C’est avec ma double nationalité et donc avec un double regard que j’ai lu l’article d’André Dubuc dans le Journal les Affaires faisant état « d’une vague de dirigeants français »
qui commencent à déferler sur le Québec. Cette prétendue vague commencerait à faire naitre des inquiétudes au sein du « Québec inc ».
Quelle en est la raison ? Faut-il vraiment s’en inquiéter ?
La réponse formulée par Philippe Bourbonnais, associé principal chez Korn Ferry, chasseur de têtes à Montréal, donne une explication rationnelle au phénomène : » Ce n’est pas un signe qu’il n’y a pas de talent au Québec, soutient-il. Il y a des hauts dirigeants de très grand talent au Québec, mais ils ne sont pas à la recherche d’un emploi. D’où la nécessité d’ouvrir les frontières« .
Et ce phénomène n’est certainement pas propre au Québec. La mondialisation conduit les entreprises à se doter de dirigeants qui possèdent une expérience et une maitrise du management dans un contexte international et multiculturel. C’est le prix de la réussite mais aussi une formidable occasion de s’ouvrir à de nouvelles façons de faire, de nouvelles pratiques d’affaires et donc un enrichissement pour les entreprises. Voir l’opportunité avant le risque relève d’une vision stratégique essentielle dans un monde économique soumis à de fortes turbulences et celles qui font ce choix ont certainement de bonnes raisons.
Il faut aussi comprendre que le nombre de ces nouveaux venus reste raisonnable et répond finalement strictement aux besoins des entreprises québécoises. Je me souviens d’un temps pas si lointain où les cadres français, à l’ouverture de l’espace Schengen en Europe, craignaient l’afflux de cadres néerlandais au motif que ceux-ci étaient polyglottes (ce qui n’a jamais vraiment été la force première des dirigeants français). Quelque 15 ans plus tard, on n’en parle plus et la supposée vague n’a jamais eu lieu…
Je laisse le mot de la fin à Jean-Benoît Nadeau (écrivain québécois connu pour avoir publié deux excellents livres sur les Français et leurs particularités – à recommander vivement à tous les français qui viennent s’installer au Québec) et qui témoigne dans l’article : » La francophonie fonctionne. Des Québécois travaillent à l’étranger – Patrick Pichette chez Google, Paul Lirette chez GlaxoSmithKline, Louis Chênevert chez United Technologies, pour ne nommer que ceux-ci – et des patrons Français viennent introduire des idées nouvelles. C’est une très grande richesse… « .
Il n’y a donc pas péril en la demeure mais peut-être une occasion unique de profiter de cette apport de dirigeants français pour renforcer les échanges économiques franco-québécois. Et en la matière, il y a encore du chemin à parcourir !
Quelques chiffres sur les Français au Québec (Source : Office français de l’immigration et de l’intégration (2007) :
- 3 500 nouveaux résidents permanents par année
- 7 600 titulaires d’un permis de travail temporaire
- 6 800 Étudiants inscrits dans un établissement d’enseignement