Exporter est toujours un défi pour une entreprise quelque soit le territoire visé. Le Québec ne fait pas exception à la règle pour les entreprises françaises bien qu’il soit souvent perçu comme un premier pas à l’export relativement facile (avant d’être vu comme un possible tremplin idéal pour le marché nord-américain).
Pourtant les chiffres de l’activité commerciale bilatérale entre la France et le Québec ne sont pas si bons que cela. Les explications, si elles sont diverses et variées selon les secteurs, peuvent être trouvées dans certaines erreurs fréquentes commises par les exportateurs français.
Erreur #1 : Penser qu’il faut absolument ouvrir une filiale
L’annonce est fait toujours bon effet . « Nous ouvrons une filiale au Canada« . Soit, mais passé l’effet d’annonce, la réalité des coûts d’exploitation d’une filiale sont loin d’être négligeables alors que d’autres alternatives sont envisageables. Des avenues souvent moins coûteuses comme le recours à des partenaires pour vous représenter ou distribuer votre produit.
Un marché à l’exportation quel qu’il soit, présente des particularités, une dynamique et des obligations qui lui sont propres. Ce partenaire local vous donnera un accès plus rapide au marché (pensez simplement au fait qu’il a déjà un portefeuille de clients), vous évitera certaines erreurs (voir ci-après) et vous permettra de comprendre plus rapidement la culture d’affaire locale.
Erreur #2 : Viser forcément Montréal pour une implantation
On est toujours tenté par la solution la plus évidente. Une entreprise qui s’implante dans un pays va viser le plus important centre économique en tablant sur la taille du marché qu’il représente. En tablant aussi (ce n’est pas faux) sur la forte présence de sièges sociaux et donc une proximité avec le pouvoir décisionnel. Mais est-ce forcément la meilleure stratégie.
Quand plus de 80% des entreprises françaises visent Montréal pour s’implanter au Canada, ont-elles fait une véritable analyse de marché ? Veulent-elles prioriser la taille (relative) du marché local accessible, une ouverture vers les États-Unis ou un écosystème favorable au type de produit ou service qu’elle offre ? Un screening rapide de choix d’implantation permet souvent, et après coup, de se rendre compte que ce choix n’est pas toujours le plus pertinent. Et notre expérience nous incite même à penser que la recherche d’un écosystème est un choix à ne pas écarter. En effet, c’est une option qui peut s’avérer payante en termes d’accessibilité à de la main d’oeuvre qualifiée, de capacité d’innovation en privilégiant la proximité de centres de recherche spécialisés et même de présence de la concurrence (qui dit qui concurrence dit existence d’un marché).
A titre d’exemple, une entreprise française du domaine de l’opt0-électronique aura peut-être intérêt à privilégier la région de Québec en raison de l’existence du Centre d’Excellence (équivalent des pôles de compétitivité français) en optique-photonique, le CIOP, qui est leader canadien dans ce secteur de très haute technologie.
Erreur #3 : Ne pas recruter de compétences locales
Exporter, c’est d’abord embrasser une nouvelle culture d’affaires ! Et le Québec ne fait pas exception à la règle. Cette terre de cousins, telle qu’elle est trop souvent présentée ou perçue en France, est avant tout une terre d’Amérique. La culture sociale et professionnelle qui prédomine est donc bien plus proche de la culture américaine que de la culture française.
En être conscient évite bien des erreurs qui s’avèrent souvent irrémédiables avec les partenaires québécois. Des interlocuteurs qui y sont régulièrement confrontés lorsqu’il s’agit de « faire de la business avec les français » (comme on dit ici). Les exemples ne manquent pas et le plus courant se retrouve dans les présentations commerciales. On y voit souvent une litanie de sigles et d’acronymes lorsqu’il s’agit par exemple de présenter avec fierté des références avec EDF, la SNCF ou la RATP. Des grands noms pour nous français mais qui n’ont pas beaucoup de sens sur les rives du Saint-Laurent…
En guise de préparation, nous vous renvoyons aux 10 commandements en affaires France/Québec. Si cette lecture vous parait évidente, c’est que vous êtres prêts ! Si elle vous intrigue, vous venez de comprendre pourquoi un recrutement local est un atout majeur quand on s’adresse à une culture dans laquelle vos interlocuteurs, sympathiques au demeurant, seront de redoutables hommes d’affaires et non pas d’aimables cousins…
Erreur #4 : Trop compter sur le « Made in France »
Ah le label Made in France cher à l’ancien ministre Montebourg ! Il est vrai que la France peut s’enorgueillir de certains succès mondiaux importants et de certaines filières qui ont une notoriété mondiale. Le luxe en est un exemple typique. Que l’on parle de parfums, de haute-couture ou d’accessoires de mode. La gastronomie en fait partie également avec des chefs de renom comme Pierre Gagnaire ou Joel Robuchon, et plus proche de nous Jérôme Ferrer à Montréal. Leur réputation a depuis longtemps dépassé les frontières de l’hexagone et ils ont même bâti des entreprises implantées dans plusieurs pays.
Mais il ne faut pas de leurrer non plus, le « Made in France » ne fait pas tout et a perdu de son lustre avec la mondialisation galopante. Il ne fait plus rêver comme d’antan et ceci est encore plus vrai au Québec. Nous ne rentrerons pas dans un cours de sociologie pour l’expliquer mais il est important de comprendre que l’image du produit « fabriqué en France » n’est pas toujours aussi bonne que ce qu’imagine leurs concepteurs. Il est souvent perçu (à tort ?) comme complexe ou répondant à trop de besoins à la fois. On ne refera pas le monde. Sachez-le et vous serez mieux préparé aux questions de personnes qui en affaire sont très directes. Vous éviterez bien des surprises !!
En synthèse, jouez sur vos forces, tablez sur la différenciation de votre produit ou de votre service,…plutôt que sur son certificat d’origine !
Erreur #5 : Tout miser sur un VIE
Le principe de Volontaire international en entreprises (VIE) est une belle initiative mise en place par le gouvernement français afin de faciliter l’acquisition de compétences et d’expérience à l’exportation de jeunes diplômés français. Ceux-ci sont envoyés, dans des conditions avantageuses pour leurs employeurs, dans des filiales internationales ou dans des structures porteuses (Ex : Chambre de commerce française à l’étranger) pour tester ou ouvrir un marché pour des PME à moindre coût.
On voit donc régulièrement des PME qui envoient, en solo, leur jeune VIE comme fer de lance. Avec l’idée qu’il pourra à lui seul défricher le terrain et ouvrir des opportunités à l’entreprise. Un jeune que le patron appelle sur Skype tous les mois (voire parfois moins – on parle encore ici d’expérience vécue) pensant que ce suivi « serré » fera l’affaire. La réalité est souvent tout autre. Un VIE seul, si talentueux soit-il mais sans expérience du terrain et de la culture locale, a t-il de bonnes chances de réussir là ou des vendeurs aguerris ont parfois du mal à percer les mystères d’un nouveau marché ?
L’encadrement est la clé. Au final, l’investissement d’une année ou plus dans un VIE (programme que nous encourageons fortement par ailleurs) sans résultats probants coûtera plus cher qu’un investissement dans un VIE, supporté ou encadré par une expertise locale. Une connaissance fine du terrain et des réseaux qui éclairera la réflexion et donnera une perspective, positive ou non, à beaucoup plus court terme.
Et maintenant, que devez-vous faire pour exporter au Québec ?
L’exportation demande un effort de tous les instants et doit être clairement intégrée à la stratégie de l’entreprise. Celle-ci doit alors l’inscrire dans ses priorités opérationnelles et se donner les moyens humains et financiers adaptés au nouveau marché qu’elle veut conquérir. Le Québec n’échappe là encore pas à la règle…
Vous avez votre propre expérience ? Qu’en pensez-vous ?
Vous êtes une entreprise française et vous avez un projet d’exportation, contactez-nous…
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